Entretien collectif, Groupe Sud-Creuse

PLURIACT   Entretien collectif Sud-Creuse

mercredi 30 octobre 2018

 

Le groupe Sud-Creuse a été constitué sur une initiative du docteur Etilé. La coordination a été confiée à Elodie Monnier, psychologue de la MAIA d’Aubusson. Le groupe est composé de six intervenants médicaux et sociaux de la zone Sud-Creuse. Son démarrage tardif a contraint à réduire les délais prévus entre les séances 

Les participants regrettent que la mise en place de leur groupe ait été précipitée, imposant des bouleversements dans les emplois du temps et ne donnant pas suffisamment de recul d’une séance sur l’autre. Un travail de ce type requiert de la disponibilité intellectuelle, il nécessite pour cela d’être bien informé sur le déroulement complet du programme. Il est rappelé qu’à l’origine ce groupe a été constitué par défaut du projet d’une équipe basée sur le Pôle Local de Santé de Royère de Vassivière. Malgré cela un sentiment général de satisfaction s’exprime : la composition de ce groupe a eu l’intérêt d’avoir une meilleure connaissance des divers acteurs. « Malgré les contraintes on est quand même venues pour se poser, se sortir de la routine, exprimer les choses librement sans la hiérarchie et avec des collègues avec qui on a du soutien. » Il a été apprécié de ne pas être deux représentants du même service : « un seul membre d’une même équipe, ça fait un petit groupe, les échanges sont facilités, on est tous dans notre partie… ça donne une liberté de ton… ». La démarche serait intéressante pour une même équipe mais ça ne serait peut-être pas aussi facile avec la hiérarchie. La question de la participation des « chefs » est soulevée, si elle est souhaitée leur présence modifierait les échanges, « en face de sa hiérarchie… la parole n’est pas toujours facile… ». Ce souhait de leur participation justifie de pouvoir passer outre la crainte de la hiérarchie.

La présentation abstraite de Pluriact a pu être rébarbative pour certains : « au début je n’ai rien compris ! », crainte de « n’être pas à sa place », « d’un trop haut niveau ». Ainsi en est-il de l’introduction aux séances : « c’était un peu lourd,  abstrait, après la reformulation ça parlait plus ! » Tous les axes étaient intenses et le plus difficile à comprendre était le dernier. Le premier axe sur les dysfonctionnements a été brutal, mais ça a créé le groupe, les différences ont été mises sur table : « on revient quand même et on continue à travailler ensemble… » Les séances s’enchaînaient bien, cela  nous a permis de constater qu’on avait des objectifs communs et cela a beaucoup aidé à souder le groupe… Les quatre autres séances étaient difficiles à intégrer intellectuellement mais ça a créé une communauté d’ambition, le bien ou le mal qu’on peut faire aux gens dont on s’occupe, ça conforte pour l’avenir, ça donne envie de continuer à travailler ensemble… Les comptes rendus permettaient de prendre un temps de réflexion dans le fatras du quotidien ! C’est vraiment difficile de réfléchir à ce qui s’était passé pendant les séances parce qu’on est à fond toute la semaine, on n’a pas de temps pour réfléchir ; par contre les réunions c’était bien, c’était du temps pour prendre du recul, on ne prend pas forcément ce temps là…

Après coup, le côté abstrait de la démarche est vécu positivement : « Au moins on se sentait solidaires dans la non-compréhension, cela créait de la dynamique et obligeait à partager avec les autres et permettait de franchir la difficulté… Finalement je pense qu’il faut laisser la formulation comme ça mais également la reformuler autrement… »

En revanche, il est suggéré que le site soit plus accessible : « Il faudrait trouver des exemples dans la réalité et/ou décomplexifier par des petites questions… »

Le cheminement du groupe conduit à faire le constat de la nécessaire adaptabilité des professionnels. La finalité de tout travail induit des changements, faire ce genre de travail collectif induit une modification de la perception du travail à faire… A l’heure actuelle la vie des gens c’est la routine, ça sécurise, le changement fait peur… On rencontre des gens qui vont tellement mal, il faut continuer à leur proposer des solutions…Pour nous professionnels, si on n’est pas capable de changements, je ne vois pas comment on peut aider les gens à changer … Mais persuader les gens que ça les amènerait à réfléchir et à évoluer, pari difficile à lancer !

Le groupe exprime également son impuissance face au pouvoir politique : « J’ai toujours l’espoir d’en faire quelque chose sur le terrain, mais on se rend compte que les dysfonctionnements ne sont pas forcément toujours liés à nous mais aussi aux contraintes extérieures ; comment faire avec nos décideurs, nos financeurs pour qu’ils tiennent compte de nos remarques ? »

Les axes, c’est bien mais ça nous laisse un peu sur notre faim, on va retourner dans notre milieu de travail professionnel mais on n’est pas décisionnaire… on attend ce qui va changer par rapport à ce qu’on a pointé du doigt… S’il n’y a pas  de changements, le constat restera le même, ce qu’on a fait c’est bien pour nous, ça nous a permis de sortir momentanément  la tête du guidon, finalement on est assez impuissants…

Malgré tout, les membres de ce groupe expriment un sentiment d’apaisement au fait de se rendre compte qu’ils ne sont pas seuls, tous sont concernés et se battent sur une même ligne de conduite : « Moi de façon tout à fait personnelle ça m’a fait sortir de ma solitude ! » Les échanges et le travail réalisés sont également appréciés : « La dernière séance m’a déçu parce que c’était la fin, j’ai énormément aimé ce travail, dommage… », « Cela a été un plaisir à chaque séance et c’est monté crescendo. », « Plus on avançait plus je me sentais à l’aise, confiante… », « Ce qui nous réunit c’est la volonté de bien faire. »

La démarche a déjà eu cet effet de se rencontrer, de se connaître, dès lors, il sera plus facile d’aller les uns vers les autres, de se contacter et de travailler ensemble : « Ma difficulté est de me  resituer au sein de l’équipe, je fais un travail solitaire c’est un aspect de réflexion peu ordinaire… »

Certains membres du groupe expriment leur difficulté à parler de leur expérience de Pluriact : « si on n’a pas vécu le dispositif, on ne peut pas le comprendre ! » « Ce que j’ai vécu m’appartient, ça appartient au groupe. »  Ce que l’on peut dire c’est que ça va influencer la qualité des échanges dans le travail.

Et après ? Les membres du groupe s’interrogent sur la suite qui pourrait être donnée à Pluriact : « Va-t-on continuer à se rencontrer ? Pourquoi ne pas garder ce groupe et aller plus loin, continuer à échanger,  sur un truc inachevé ?… Pourquoi le CLIC ne serait-il pas plus investi dans la démarche, que ce soit un projet de la hiérarchie, qu’il y ait des temps de rencontre avec les libéraux, hors du contexte UTAS, qu’on sache qui fait quoi… Comment continuer à se questionner au sein de notre groupe sur la lancée de ce qu’on a vécu… genre « Pluriact Café » !…

« Ce qu’on a vécu nous a changés, nous respectons nos métiers, ce qui se dira au Symposium sera juste un témoignage du vécu de ce travail ensemble, à faire partager… »