Compte rendu de la réunion des délégués des équipes

Le jeudi 15 novembre, les délégués des équipes se rencontraient pour la première fois. Le but de cette réunion était d’apporter des réponses à la question posée par Pluriact et de préparer la synthèse présentée le lendemain par Alain Molas, lors du Symposium.

Les ateliers ont proposé six axes de réflexion à neuf équipes. La dynamique de ces six séances permet-elle d’identifier un processus qui soutienne l’éthique d’un collectif et favorise des effets de cohérence ?

Cette démarche est-elle transmissible ? Dans l’affirmative, comment ?

Présentation

Alain Molas présente le travail de la séance, la poursuite du travail de recueil, de partage afin de dessiner la transmission de Pluriact et sous quelle forme.

AM propose un tour de table.

  • Que pensez-vous de cette démarche ? Comment la transposer ?

Le constat du « devoir de transmettre » cette expérience est partagé : « la transmission est un échange », « on n’a pas le droit de priver les autres de cela », « il faut que les autres passent aussi dans des groupes de travail. »

La volonté de participer à cette action est aussi un besoin. 

Le travail fait dans les ateliers est un important travail de réflexion utile, constructif. La démarche est transmissible. L’équipe du Foyer Les Méris a par exemple choisi de développer le thème de l’alimentation, l’outil peut être transposé à un autre thème.  

Les équipes vivent l’aire de l’immédiateté, ce travail permet de décloisonner, d’échanger ce qui ne se passait plus. L’équipe du CMP a par exemple invité des professionnels extérieurs.

Il est constaté que la démarche demande un engagement collectif et individuel. Dans le cas de l’équipe de Gaillac, la démarche a été présentée à la mairie à Gaillac, avec l’histoire de ce projet, son mûrissement, la démarche clinique et intellectuelle. Et il y a eu les élus qui ont dit «  on y va ». Il y a eu la volonté au niveau de la municipalité.

Parallèlement à l’engagement institutionnel ou hiérarchique se pose l’engagement individuel. Son importance est mise en relief par l’équipe de la PJJ, dans lequel les personnels opposés à la démarche ont néanmoins pu s’exprimer. Ceux qui ne voulaient pas participer « ont écouté et ils ont entendu ! » Cet engagement est également exprimé ainsi : « cela remue des choses, tout le monde n’a pas les mêmes valeurs, il faut une volonté pour communiquer. » C’est un besoin qui émane de la nécessité de remettre du sens dans l’activité, de retrouver un lien aux autres.  C’est un bien pour tous.

Dans le groupe de cohésion sociale, elle a permis, par exemple, de confronter deux visions de l’accompagnement de la personne, l’une plus cadrée, l’autre plus souple. 

La réalisation de l’expérience a été favorisée par des animateurs extérieurs, dans une position non jugeante. Elle a permis aux professionnels de se questionner sur leurs valeurs, loin de la technicité. Les séances ont favorisé une intimité dans le groupe, en remettant l’humain dans le travail : « on sait qu’on est protégé par la bienveillance des uns et des autres. On se fait confiance, cela crée un cadre protecteur : là, c’est permis de dire ! »

Il est souligné que le lieu d’expression doit être sécurisant, il permet de s’exprimer et de favoriser les prises de conscience.

La singularité de la démarche a soulevé des questions. Pour certains le cadre de travail était très défini : « on rentrait dedans comme dans des pantoufles ! » En revanche pour d’autres ça n’a pas été si simple que cela, « on ne savait pas ce que c’était ; mais il n’y a pas eu de gêne à discuter. » Certains disent avoir eu besoin de repasser par un écrit personnel en suivant les axes pour comprendre ce qui se passait, ce que cela remuait ! 

AM précise que Pluriact est un outil structuré depuis longtemps.

Le fait qu’on ne se rend pas compte que c’est un outil structuré a permis de libérer la parole tout simplement. L’équipe de Gaillac explique l’enthousiasme des premières séances. Et à partir de la 5eme séance « nous sommes sortis de notre zone de confort et là ça nous a demandé de l’engagement, des positionnements, des notions… jusqu’à la quatrième ça nous engageait pas trop. »

Ne pas connaître l’outil permet de se l’approprier. La technique est nécessaire pour l’élaboration de l’outil. Et s’approprier l’outil est déjà rentrer dans le travail.

Cet outil pose la question de sa transmission : qu’est-ce qu’on en fait ? « Pour nous au niveau de l’équipe, pour nous à la MGEN ça a été très, très riche, mais qu’est-ce qu’on en fait dans une grosse structure ?  Est-ce qu’on construit quelque chose autour de ça ou est-ce que ça reste en l’état ? »

AM : il y avait un manque fondamental dans notre travail : le manque d ‘usagers.

Alain Depaulis : « à l’origine, à la création du SESSAD on pensait partir de la place des usagers, repartir de la parole de l’usager, du patient en considérant qu’il était le mieux placé pour exprimer ce qu’il vit. Nous avons sollicité des représentants des usagers mais ça a été très difficile à mettre en œuvre dans la démarche. »

Il y a ce manque de représentation des usagers

Les échanges se développent très longuement sur la question de la participation des usagers à la démarche. C’est une carence qui a été ressentie dans certains groupes.

Si l’idée est de travailler différemment pourquoi ne pas le faire avec les usagers… Un exemple est donné d’un projet associatif dans lequel des usagers ont eu des idées auxquelles on n’aurait pas pensé. « Ça rend presque le consensus plus facile quand ils sont là ! »

La première réserve tient à l’orientation des ateliers si les usagers avaient été présents.

« Au CMP, on aurait pu être plus volontariste la dessus. On aurait pu en inviter mais le travail aurait été autrement. Chez nous les représentants des usagers ne sont pas les usagers. »

Au CH d’Aubusson : « c’est pas forcement simple d’intégrer dans une démarche des usagers suivant le public. On ne peut pas avoir les échanges aussi vifs qu’on a eu entre collègues. Des fois on a eu des échanges forts et on ne peut pas exposer nos désaccords et cette faiblesse-là. »

A Sud Creuse : « Il y a eu une réunion ça m’aurait heurtée… Si j’avais été usager je prenais une corde… », « Je pense qu’il y a un temps pour tout. »

AM : « il ne faut pas le déplorer mais le prendre en compte. Il y a eu un temps préalable qui permettra ensuite de le prendre en compte. »

« On n’a jamais écarté l’usager de nos échanges, jamais, jamais. On était d’horizons différents. On a appris à être ensemble d’abord et c’est maintenant qu’on serait prêt. Il faut d’abord mettre de l’ordre dans le travail partenarial avant de s’engager avec les usagers. La première réunion aurait fait fuir !»

« Certes mais réinterrogeons notre façon de travailler et allons jusqu’au bout de la démarche. Oui c’est difficile mais en face de moi j’ai un homme, une femme et je suis aussi un homme, une femme. Peut-être on pourrait lui simplifier sa posture à lui. On peut entendre. L’usager peut entendre. On peut s’entendre. »

« Sud creuse : ce que je voulais dire c’est qu’on va déjà apprendre à travailler ensemble avant de proposer quelque chose. Comment on trouve l’adéquation pour s’articuler autour de l’usager. Je pense qu’il y a une temporalité pour ça. Par exemple : on ne peut pas faire vivre ce type de réunion à des personnes qui sont déjà en difficulté. »

Dans le Foyer d’hébergement pour adultes avec handicap psychique et handicap social entre 20 et 70 ans certains travaillent d’autres pas. Ils présentent des handicaps à des échelles différentes. Ils participent au travail sur le projet associatif global. Durant les séances, « Il y a des choses qui se sont dites qu’on n’aurait même pas osé dire en analyse de la pratique. Leur présence nous aurait bridés mais je pense que maintenant on pourrait les intégrer dans notre processus. Si on ne les intègre pas maintenant on les prive d’une partie de la co-construction. »

Une remarque est livrée par la PJJ : les jeunes « d’âge judiciaire » ont de 12 à 20 ans. Ils sont soumis au fait de nous rencontrer. « Nous sommes soumis à la loi 2002 donc nous sommes sensés leur demander leurs avis, les associer. Il y a une boîte pour recueillir leurs attentes, en 4 ans, il y a eu 7 bulletins. Dans la tête des usagers mettre un bulletin, sachant qu’on n’est pas dans la co-construction, ce n’est pas dans la culture. »

C’est une question de culture pour les professionnels et pour les usagers.

La présence des usagers n’est pas forcement possible partout et pour tous les axes.

L’usager n’est pas dupe, il voit les dysfonctionnements ; c’est lui qui a le discours, qui a le parcours de soin. C’est un peu gênant de dire ce qui ne va pas mais nos patients le disent.

Ca dépend des usagers et de leurs profils, comment ils peuvent gérer ça émotionnellement.

Dans un CH, comment distinguer un patient qui peut être présent ou non ?

Jean Navarro évoque le cas de patients qui ont parfois connaissances techniques et qui ont un positionnement intéressant. Il évoque également l’existence d’associations qui jouent parfois de leur pouvoir politique.

Les équipes font part de leur expérience.

A Gaillac, sur la plateforme on parle plutôt de personne accompagnée, de bénéficiaires plutôt que d’usagers. On accueille des personnes en état de fragilité sociale. Dans un café associatif il y avait une boîte. De faire participer quelqu’un ça permet d’être plus autonome, de s’investir plus.

Au pôle à Bourganeuf : accueil de personnes âgées et souvent avec des problèmes sociaux. Il y a une commission des usagers. On ne cache pas les dysfonctionnements. Les personnes peuvent apporter leur avis, avoir leur mot à dire. Mas je ne les vois pas parler des dysfonctionnements d‘une équipe. Ils ont aussi besoin d’avoir confiance en une équipe qui doit leur renvoyer une certaine cohérence.

Au CRRF de Noth nous recevons des personnes en situation de handicap avec troubles neurologiques, orthopédiques, des personnes victimes d’AVC, des personnes qui ont des problèmes de santé, des personnes qui sont en rééducation…

La personne est au centre de la rééducation. On part des attentes de la personne. Le patient ou des proches sont présents aux synthèses lors desquelles sont décidés des objectifs communs. S’il y a consensus, on part sur une durée d’accompagnement. S’il n’y a pas consensus on dit qu’on n’est peut-être pas les plus adaptés pour répondre aux demandes de l’usager.

A Sud-Creuse, nous avons un public commun : des personnes âgées en situations complexes qui sont issus de structures très différentes. Pluriact nous a permis de nous réunir. Notre collaboration est nécessaire. On avait besoin de se connaître pour ensuite travailler ensemble et pourquoi pas dans un second temps introduire l’usager dans nos échanges. On a dans nos structures des cliniques et on va au domicile pour recueillir la demande de prise en charge. J’intègre l’usager dans mon travail et pourtant je n’aurais pas souhaité dans un premier temps la présence de l’usager. On a été frustré d’arrêter. On souhaite se revoir.

Perspectives : « il faudrait appliquer cette démarche à d’autres groupes, j’imagine que petit à petit tout le territoire fasse la démarche et que peu à peu cela changera le fond des choses. »

Antoine GATET,  juriste.

Discussions autour des formes de la transmission.

Distinction de l’association PLURIACT du groupe de recherche :

Il faut le nommer de manière lisible afin de permettre une distinction entre l’association Pluriact, la publication issue d’une recherche et de l’expérimentation, et le “rendu” valorisable.

Choix de l’association sur le devenir de cette recherche et sa transmission.

Quel terme utiliser ? Charte, doctrine, démarche, processus. Le terme “engagement” est proposé.

Questions de propriété intellectuelle : pas besoin de “dépôt”, les publications autour de la recherche et leur contenu constituent le socle des droits de propriété intellectuelle.

Parole de la représentante des usagers du groupe de recherche : « Vous c’est votre métier, nous c’est notre quotidien ! »

AM mot de la fin

A demain