CMP de Crest, Symposium

Présentation du travail réalisé au CMP pour enfants et adolescents de Crest.

Symposium de Guéret, le 16 novembre 2018

Le contexte institutionnel:

Le Centre Médico Psychologique pour enfants et adolescents de Crest est une structure hospitalière, dépendant du Pôle de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du Centre Hospitalier Drôme Vivarais.

Ce CMP est implanté au cœur d’un bassin de population étendu, situé au Sud-Est de la ville de Valence, bassin qui regroupe environ 42000 habitants, dont 10000 jeunes. Les caractéristiques socio culturelles sont assez spécifiques, et le territoire est essentiellement rural, et parfois montagneux (massif du Vercors, Préalpes du Sud, etc.)

La mission de service public attribuée au CMP consiste en l’accueil, l’évaluation diagnostique et les soins pour toute difficulté psychologique des enfants et des adolescents résidant, ou étant scolarisés, dans ce secteur géographique.

L’offre de soin psychique sur le territoire étant restreinte, les familles et les jeunes patients ont peu ou pas d’alternative proche, et de fait les demandes de soins adressées au CMP se font de plus en plus nombreuses, d’où une liste d’attente de près de 90 dossiers, et des délais d’accueil variant selon les cas entre quelques jours et 10 mois.

Notre équipe pluridisciplinaire se compose de:

– 0.5 ETP Pédopsychiatre

– 0.4 ETP Cadre de santé

– 0.8 ETP Secrétaire

– 1.8 ETP Psychologue

– 0.6 ETP orthophoniste

– 0.6 ETP psychomotricien

– 0.4 ETP Assistante Sociale

– 1.8 ETP Infirmier

L’équipe se déplace tous les mardis sur l’antenne du CMP de Die.

Le CMP est un lieu d’accueil et d’information pour les enfants et leur famille mais aussi d’évaluation, de soutien et d’accompagnement dans le cadre d’un projet de soin individualisé.

Il dispense des soins en individuel ou petits groupes et dispose d’une Équipe Mobile. Au total près de 400 jeunes sont suivis chaque année au CMP.

Le CMP de Crest et la démarche Pluriact

L’ensemble de l’équipe a d’emblée été très flattée, et intéressée, par le fait d’être retenus par les initiateurs de cette recherche action pour participer à l’expérience.

En effet, la thématique retenue (travailler à plusieurs et en pluridisciplinarité) fait partie de longue date des préoccupations des équipes de CMP, tout en étant reconnue comme étant une des points d’amélioration nécessaire.

C’est pourquoi nous avons choisi de mener la démarche en invitant aux sessions des partenaires du réseau.

Ainsi en plus des 10 personnes de notre équipe, ont pu participer régulièrement :

  • Une Assistante Sociale scolaire, intervenant en collège et lycée
  • Une éducatrice du conseil départemental, service de protection de l’enfance, intervenant notamment dans des actions d’accompagnement éducatif à domicile

–   Un psychologue et un chef de service éducatif d’une maison d’enfant (association départementale de la Sauvegarde de l’Enfance et de l’Adolescence)

–   Une cadre de santé d’un autre territoire de notre pôle de pédopsychiatrie, ainsi que la cadre socio-éducatif du Centre Hospitalier Drôme Vivarais. 

Organisation concrète des ateliers Pluriact

Les temps d’échange et de réflexion (7 réunions au total, de décembre 2016 à mars 2018) ont eu lieu pendant notre temps de réunion clinique le vendredi matin, ceci afin de ne pas réduire nos possibilités d’accueil et de prise en soins des jeunes patients.

Notre itinéraire Pluriact

Lors du symposium de Guéret, face au défi qui consistait à résumer les temps forts d’un travail de 16 mois en 10 minutes, nous avons choisi une forme de récit subjectif peu formalisé, à savoir le commentaire de photographies.

Cela nous a permis de tenter de transmettre certaines des réflexions, interrogations, résolutions et émotions que ce travail avait mis à jour.

S’il n’est pas facile de restituer une forme littéraire compréhensible à cette présentation, nous le tentons tout de même dans les lignes qui suivent.

Ainsi l’équipe de Crest vous invite dans ces actions à une promenade en image… sans les images !

 

  • Photos 1 et 2 :

Indiens Mohave (Jeune sujet en tenue de tous les jours. Réunion de dignitaires en grand apparat)

 (Il y a là un clin d’œil à la Georges DEVEREU, qui a fait ses recherches ethno psychanalytiques au sein de cette tribu d’Amérique du Nord).

Une équipe c’est un peu comme une tribu : Elle possède ses rituels, ses us et coutumes, sa culture propre.

Tout ceci est perçu comme normal de l’intérieur, alors que pour les personnes extérieures, dont les partenaires, et parfois les usagers, cela est vu comme exotique, voire bizarre, en tout cas souvent peu compréhensible.

  • Photos 3 (sous-bois à l’automne), 4 (champ de coquelicots) et 5 (brouillard de pollution sur la vallée du Rhône)

Les éléments (début) :

  • La terre (le territoire, le terroir)
  • L’Air (l’environnement).

Exercer en milieu rural et montagneux fait qu’on partage, avec les autres équipes et avec les usagers, le même environnement, certains traits culturels, certains avantages et certaines contraintes.

Un avantage est que le réseau avec qui l’on est amené à travailler est plus facile à connaître, il est plus stable qu’en milieu urbain, les liens plus faciles à nouer. Un inconvénient est que les évitements, les alternatives et les fuites moins faciles.

La pression des ’’dégradations écologiques’’, au sens de l’environnement social, sont également partagées entre l’équipe, les partenaires, et les usagers:

Il en est ainsi des fracturations sociales progressives (retour des grandes inégalités telles que celles du XIXème siècle, baisse des moyens dévolus aux personnes en difficultés, difficultés rencontrées par les diverses institutions…).

  • Photo 4 (Le point de vue du gras)

1ère photo au monde. Nicéphore (Joseph) NIEPCE, de Chalon sur Saône, l’a prise depuis la fenêtre de sa maison de Saint-Loup de Varenne en 1827.

Ce paysage est au premier abord très simple, voire quelconque, à peine lisible. Des choses d’aspect aussi simple et peu attractif peuvent avoir une importance considérable, ce que l’on reconnaît si on prend en compte le contexte et l’histoire.

Par ailleurs, NIEPCE dont on retient le seul nom pour cette invention, a toujours travaillé ’’à plusieurs’’, d’abord avec son frère (ils sont à eux deux les inventeurs du premier moteur à explosion !), il a ensuite bénéficié des inventions de collègues chimistes, avec lesquels il travaillait en étroite collaboration, pour enfin réussir à mettre au point son procédé photographique.

Ayant le talent de transmettre ses idées et ses passions, il a aussi été bénéficié de l’aide financière de membres de sa ’’famille élargie’’. Il est dit que le beau-père de son fils a été jusqu’à vendre son château pour l’aider dans ses recherches.

  • Photos 5, 6 et 7

Les éléments (suite) :

  • L’eau (Pont sur la Drôme)
  • Le feu (feu de bois) 

Héraclite aurait dit ’’on ne se baigne jamais dans le même fleuve’’. Les situations rencontrées et travaillées à plusieurs sont toujours des situations complexes, peu lisibles, ouvrant à des interprétations multiples.

Si certaines structures des problématiques sont redondantes, à chaque fois le travail clinique ouvre sur de nouvelles découvertes, une nouvelle aventure.

Le pont évoque la nécessité de mettre l’énergie et le savoir-faire nécessaire franchir les obstacles et les distances entre métiers, entre équipes, entre professionnels et usagers.

Paradoxe, avant de construire le pont, il faut avoir pu se mettre d’accord (partage d’un désir, d’un projet).

Le feu de bois fait référence aux passions qui animent nos métiers de la clinique et du social. L’investissement passionnel des professionnels favorise le partage, il peut également susciter la survenue d’une conflictualité et de clivages, alimentés par l’engagement personnel des différents acteurs.

Le feu nous rappelle aussi que dans le travail de partenariat, il est nécessaire, sans relâche, de ’’réanimer la flamme’’.

Le feu renvoi à la douleur, à la souffrance, voire à la malédiction. Le jeune patient, sa famille, sont souvent habités de ce feu intérieur, difficilement partageable. Les professionnels, et les institutions, doivent reconnaître les risques de se laisser envahir par la souffrance et les angoisses de leur patientèle.

  • Photos 8 et 9

Le pont courbe suspendu de Térénez. La force des torons (schéma technique)

Ils se sont mis à deux pour dessiner et concevoir ce pont, l’ingénieur et l’architecte : cela nous renvoie à la complémentarité, qui ne fonctionne pas sans dialogue.

L’incomparable puissance du travail à plusieurs :

L’élément de base de la suspension du pont est le toron.

Les torons sont constitués de fils tordus dans le même mouvement. Plusieurs torons tordus ensemble formeront un câble.

Chaque fils unitaire paraît frêle, il pourrait être sectionné par une main faible disposant d’un petit outil. Pourtant l’ensemble peut résister à des contraintes phénoménales.

  • Photo 10 : Spirale ascendante

L’équipe réunie à Crest a choisi, un peu comme un emblème de l’atelier, l’image reproduite sur une carte postale qui était épinglée dans notre salle de réunion. On y voit un personnage de dos, vêtu de sombre peignant, de blanc, vers le haut, son propre chemin, passé et à venir. Ce chemin prend ainsi la forme d’une spirale ascendante.

Un des messages véhiculé par cet emblème serait :

’’Le travail à plusieurs, un bon moyen pour ne pas tourner en rond…’’

 

  • Photo 11 : Les abeilles et la ruche

Cette image produit un tel nombre d’association qu’elle se révèle capable de rassembler toutes les thématiques développées au cours de ce parcours de recherche action.

Présentation réalisée par Audrey LAFAURIE, cadre de santé, et Christophe DESSAUX, psychiatre et pédopsychiatre, au nom de l’équipe du CMP pour enfants et adolescents de Crest (26400).

Remerciements chaleureux :

  • À monsieur DEPAULIS et à toute son équipe de Pluriact, pour leur professionnalisme. Merci à eux d’avoir pensé à notre structure pour faire partie de cette recherche action, et d’avoir accompagné avec efficacité, patience et bienveillance notre travail d’élaboration.
  • À la direction du CH Drôme Vivarais, qui n’a pas hésité un instant à soutenir la démarche, et nous a permis de participer au symposium.
  • À l’équipe du CMP de Crest et aux partenaires, qui se sont lancés dans l’aventure, sans hésiter et en toute confiance.