Entretien collectif. Pôle Gérontologie. Bourganeuf (23)

Entretien collectif PLURIACT – Pôle gérontologie (Bourganeuf)  (21/12/2017)

Une personne de l’équipe absente.

            L’équipe pointe d’emblée que les échanges avec le binôme PLURIACT étaient respectueux et agréables. Cependant, les termes employés étaient parfois un peu trop philosophiques et éloignés du terrain. L’équipe regrette de ne pas avoir pu tenir l’engagement de faire un compte-rendu à l’issue de chaque rencontre. Il est noté que d’une séance sur l’autre, les membres de l’équipe avaient l’impression de redire la même chose, même si l’angle de discussion était probablement différent. L’équipe déplore enfin le fait que le travail engagé au sein de l’équipe ne sera pas poursuivi en raison d’un changement annoncé du service (disparition de la moitié de l’équipe du service de coordination pour raisons financières). Elle craint une baisse de la qualité des soins et de l’accompagnement proposés aux patients et à leurs familles.

            Les membres de l’équipe mentionnent que la participation à cet atelier leur a permis de faire une pause, de prendre du recul, de s’écouter et de mener des réflexions. Il est rapporté que dans le fonctionnement habituel, l’équipe est « dans le faire », dans un quotidien où l’on se questionne peu sur sa pratique. Habituellement, l’équipe se réunit autour de situations problématiques où on ne fait que peu état de son ressenti. Les membres aimeraient pouvoir bénéficier de temps de pause plus réguliers (une fois par semestre). Les ateliers seront ainsi comparés à des temps d’analyse de pratique.

            La cadre de santé explique que cela lui a permis d’observer et de découvrir ou conforter des impressions concernant les membres de son équipe. Elle a ainsi pu prendre la mesure de certains traits de caractère, exacerbés lors du travail autour d’un thème commun, et les prendre en considération lors de la réorganisation future du service (du fait de la non reconduction de certains postes). Les compétences de chacun sont reconnues et valorisées et il est également noté un changement de comportement de la part des professionnelles à l’issue de chaque séance.

            La question de la perception de l’autre, en dehors de sa fonction, est également débattue. Les différentes casquettes et la réalité de terrain rendent par exemple la cadre peu disponible, ce qu’elle déplore. A ce titre, est mentionnée l’importance du partage autour de situations complexes, qui ont parfois un impact émotionnel fort. A travers ces situations, est débattue la question de la distance professionnelle : « on ne peut pas travailler sans empathie, mais jusqu’où va-t-on ? ». Si les intentions sont souvent louables, il est nécessaire pour les membres de l’équipe de rappeler, en tant qu’équipe de coordination, l’objectif commun, qui demeure de respecter et faire respecter la parole du patient. Il est noté qu’en réunion « Staff »[1], il est compliqué de rappeler cet objectif et que la place, le style et l’expérience de la cadre y sont importants : il est impératif, dans certaines situations, que certains « sachent » [prendre des décisions]. Il est nécessaire d’apporter des arguments auprès des équipes de soins pour justifier du devenir des personnes. Il sera indiqué que, même si cela paraît élémentaire, il faut néanmoins rappeler certains principes et certaines valeurs tels que les droits de l’Homme et les droits du malade.

            Concernant l’outil PLURIACT, l’équipe souligne qu’il permet de maintenir une certaine éthique. Bien qu’il paraisse évident que l’usager demeure au centre des préoccupations, il est malgré tout nécessaire de le rappeler, d’expliquer et partager les informations. En effet, au quotidien, il y a ce que les personnes veulent et ce que les personnes peuvent. Par exemple, en cas d’impossibilité de retour à domicile, le rôle de l’équipe de coordination va être de permettre à la personne d’accepter l’institution, alors même que le personnel reste parfois focalisé sur un retour à domicile.

Si le rôle de la famille est primordial dans l’accompagnement proposé, il n’en demeure pas moins que c’est le patient qui doit rester décisionnaire. Ainsi, il faut parfois « l’apprivoiser », servir d’intermédiaire et prendre le temps afin de nouer une relation de confiance. L’équipe pointe que c’est cette démarche de qualité qui est satisfaisante. En effet, même si l’injonction financière est très présente au quotidien, l’exceptionnel peut être négocié, par exemple concernant la prolongation d’un séjour si la période d’évaluation s’est avérée insuffisante. L’équipe rappelle la problématique des retours à domicile trop précoces qui engendrent des ré-hospitalisations. La cadre mentionnera des retours très positifs de la part des usagers, patients et familles. Mais d’une grande qualité d’écoute évoquée par la cadre, la CESF mettra un bémol concernant sa propre difficulté à recadrer certains entretiens, disant se « faire manger » par certains patients ou certaines familles.

Disant avoir exercé en pédagogie, la cadre évoque la nécessité de moments de réflexion, même si l’effet est parfois difficile à percevoir dans l’immédiat. Ce mot de « réflexion » sera souligné comme important pour les membres de l’équipe : parler de sujets courants, mais en les abordant d’une manière différente. Il est ainsi nécessaire, selon elles, de bénéficier de temps d’échanges en présence de personnes extérieures à l’équipe : la parole est plus libre, il n’y a pas de jugement. C’est d’ailleurs cette posture du binôme PLURIACT qui sera mentionnée à plusieurs reprises : aidants et sans jugement.

            Concernant les axes débattus, ils étaient complexes, notamment celui concernant la réflexivité qui a nécessité de s’appuyer sur un texte afin de comprendre de quoi il retournait. Bien que ce terme ait été inhibant dans un premier temps, il s’est finalement avéré stimulant. D’un mot ne « parlant pas du tout » aux professionnelles, il en sera donné deux définitions. La première, plus classique, viserait à mettre en lien l’expérience de terrain avec les apports théoriques, dans une finalité de mobilisation des compétences. La deuxième, plus intuitive, inviterait à ouvrir plusieurs voies de réflexion. Il y aurait un « supplément » à la réflexion. Quelque chose d’abstrait qu’on essaierait « d’extirper » afin d’en discuter, mais autrement. Il en sera fait un comparatif avec la relation humaine : « c’est pas quelque chose qu’on apprend ». L’assistante sociale pourra dire qu’elle n’aime pas ce terme car elle ne le maîtrise pas, non parce qu’il ne lui « parle pas », comme lui soumettra sa collègue, mais au contraire parce qu’il lui « parle trop ». Le terme de réflexion serait « plat », spontané (réflexe), contrairement à celui de réflexivité qui serait plus « épais », plus « charnu ».

            Le questionnaire individuel est débattu en fin de séance. Les membres de l’équipe ne sont pas tous d’accord concernant les attendus supposés du questionnaire : doit-on y faire figurer son ressenti ou doit-on se détacher de ce dernier ? La dernière question du questionnaire, très ouverte, suscitera un débat : certaines resteront sur un point d’interrogation et d’autres sur le terme « recherche ».

[1] Il s’agit d’un temps de réunion hebdomadaire en équipe pluridisciplinaire où sont notamment évoqués les objectifs communs de travail et le devenir des patients avec en toile de fond cette volonté d’un retour au domicile lorsque cela est possible. Cela représente, pour les membres de l’équipe, la « substance » de leur travail.